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22/01/2019

Les aventures d’Emmanuelle à Paris – Episode 2 : la pizza

Arrivée à Paris voilà quelques jours, Emmanuelle est prise d’un sentiment de solitude : ses amis d’Etudiantsville présents dans la capitale semblent la snober et ses colocataires trouvées sur Jéricho’loc ne sont jamais là le soir, où dînent devant un film dans leur chambre. Elle qui avait l’habitude des soirées entre copains, elle se retrouve seule.

Ce dimanche, elle a eu bien du mal à se motiver pour sortir. A force de repousser, elle se retrouve à la messe de 18h30 à Saint-Machin, dite « messe des jeunes ».

 

« Bonjour tout le monde, dimanche prochain les JP se retrouvent après la messe du soir pour un dîner dans la salle paroissiale ! Vous êtes les bienvenus ! »

 

Cela fait quelques jours seulement qu’Emmanuelle a commencé son stage de fin d’étude, mais déjà, elle ne se sent plus étudiante. Le changement de décor y est pour quelque chose. Si elle était restée à Etudiantsville, elle aurait surement continué à fréquenter l’Aumônerie de la Catho et le groupe étudiant de l’Emmanuel. Mais elle ne connaît personne ici, et elle aborde l’univers professionnel avec un peu d’appréhension. Ce stage, elle le sait, peut déboucher sur un CDI. Elle ne sait encore s’il faut l’espérer : est-ce qu’elle se sent en phase avec l’entreprise ? Mais depuis quelques jours, elle sent bien qu’elle a quitté pour de bon le confort de la vie étudiante.

 

Il y a donc des jeunes professionnels qui se retrouvent dans cette paroisse ? Mais bien-sûr ! Combien d’étudiants arrivent ici pour un premier boulot en ayant quitté des  univers chaleureux, déboussolés et esseulés !

 ***

Une semaine plus tard…

En mettant les pieds dans la salle paroissiale, Emmanuelle sut immédiatement qu’elle s’était trompée d’endroit. La plupart des convives avaient dix ans de plus qu’elles, dix ans de vie professionnelle dans les bottes, et se souciaient de leur arrivée à Paris comme d’une guigne : ils l’avaient pour ainsi dire oubliée. Mais trop tard, elle ne peut fuir, un grand gars sec s’approche d’elle :

- Salut je suis François-Xavier, le président du bureau ! Tu t’appelles ? Et bien bienvenue ! Assieds-toi, prends place, n’aie pas peur !

Un peu gênée, Emmanuelle s’assoit le long d’une grande table recouverte d’une nappe en papier. Les couverts sont en plastiques – à l’aumônerie de la Catho, on était passé aux couverts en dur suite à une conférence Laudato Si voilà deux ans – et un jeune dépose une pile de pizza devant eux – à l’aumônerie de la Catho, deux ou trois jeunes venaient une heure avant le repas pour faire la cuisine avec la sœur chaque jeudi midi. Emmanuelle ne peut s’empêcher de comparer. Elle se morigène. A l’aumônerie de la Catho, la liturgie c’était n’importe quoi et on passait bien peu de temps à se former réellement. Sa voisine lui jette des regards en coin mais préfère vanner le jeune homme voisin d’en face plutôt qu’engager la conversation. C’est finalement ledit jeune homme qui rompt la glace :

- Arrête de charrier, tu vas faire peur à la nouvelle !

- Oh désoléeah, t’inquièteah, on n’est pas si méchanah… Comment tu t’appelles ?

- D’où tu viens ?

- T’as quel âge ? Ah ouais mais t’es super jeune !

- Ben je sais, mais comme je débute mon stage de fin d’étude, je n’allais pas rejoindre une aumônerie étudiante…

- Ouais-ouais, nan c’est juste qu’ici c’est plutôt un groupe de 25-35…

- Ah ? On m’avait dit jeunes pros ?

Des regards sombres la foudroient. Elle comprend qu’elle a gaffé, d’une façon ou d’une autre. Une trentenaire silencieuse jusqu’alors lui glisse dans un sourire :

- Ne t’en fais pas, on n’est pas très regardant. Et si tu chantes, tu es en tout cas la très bienvenue dans la chorale. On anime la messe un dimanche par mois.

Emmanuelle répond à son sourire et passe le reste de la soirée à discuter avec Claire, infirmière, mélomane et d'un caractère doux et aimable, qui lui présente les activités du groupe avec humour :

- Si tu veux prier, il y a un groupe de louange le mercredi soir. Si tu veux te former, un groupe se fait des topos les uns aux autres le lundi soir. Si tu veux t’engager… Va voir la conférence Saint-Vincent de Paul jeunes dans la paroisse d’à-côté. Si tu veux des soirées rocks, des pizzas, des afterworks tous les soirs, tu es au bon endroit.

- Des afterworks ?

- Tu rejoins le groupe whatsapp et tu auras quasiment trois fois par semaine une proposition pour un verre après le boulot.

Emmanuelle se dit alors que son budget n’y survivra pas…

- Mais tu y vas, toi ?

Claire secoue la tête en souriant.

- Moi, ce qui m’intéresse, c’est la chorale. Mais on manque de voix d’hommes, et les filles ne viennent quasiment jamais aux répétitions. On ne sait jamais sur qui compter… Et surtout, je dois accepter tout le monde, y compris des gens qui chantent ouvertement faux. Je ne suis pas bonne publicitaire, hein ? Pour tout avouer… Je ne sais pas si je continuerais l’année prochaine… Je suis tentée par un chœur semi-pro qui me fait de l’œil depuis quelques mois.

 

22h30. Emmanuelle rentre à la coloc avec un sentiment de vide. Dans le canapé, il y a Benjamin, le grand-frère d’une de ses colocs. Il a un sourire charmant (et ne passe pas assez régulièrement à l’appart aux yeux de la coloc n°2, Anne-Sophie).

- Tiens, c’est la nouvelle coloc ? Comment tu vas ? Pas trop dur, l’atterrissage ?

Emmanuelle a envie de tout lâcher : la nullité de la ville, la mondanité des jeunes, la vacuité des conversations, le speed, le fric, la solitude. Elle se retient devant un quasi inconnu.

- J’étais au dîner des JP ce soir…

- Quelle idée !

- Ben… Je me disais que ce serait sympa de rencontrer des jeunes de la paroisse…

Elle n’ose de commentaire, se rappelant que Benjamin a lui aussi passé trente ans ; mais une forme de détresse a dû percer dans sa voix, car il la dévisage pensivement.

- Tu sais, le fait que ces groupes ne sont ouverts qu'à partir de 25 ans, alors qu’on commence à bosser généralement à ton âge ou avant, montre bien qu'il s'agit plus de sociabilité que de jeunes cherchant à mieux vivre cette étape de transition qu’est l’entrée sur le marché du travail.

Après cette longue phrase, il reprend son souffle et rassemble ses idées. Emmanuelle s’interroge : mais lui qui a passé trente ans, n’est-il pas aussi désespéré de sociabilité ?

- Toi, tu y vas, dans ces groupes ?

- Moi je n’ai raccroché les wagons avec la messe dominicale que vers 25 ans. Alors au début, les groupes de JP, je trouvais ça super. Et puis bon… Au bout de 3 ans, je me suis rendu compte que je n’y avais créé aucune vraie amitié et que ma vie spirituelle ne progressait pas. Je ressentais le besoin de formation après ma conversion, et ce n’était pas dans ces groupes que je trouvais mon compte. J’en ai parlé avec un prêtre qui m’a conseillé de faire le parcours EVEN. C’était il y a trois ans et demi… Ça n’a pas été facile, surtout que j’étais dans les plus âgés, mais en fait… J’ai accepté de me mettre à l’école de gosses de 20 ans qui avaient une foi en Dieu bien plus mature que la mienne, et qui étaient sacrément plus calés que moi sur le caté. Ça a été une épreuve d’humilité, mais une épreuve salutaire. Maintenant je n'ai quasiment plus d'engagement, en dehors des visites aux malades.

- Et c’est pour ça que tu n’es pas un célibataire désespéré ?

Benjamin a franchement rigolé à la taquinerie.

- La nature a horreur du vide, alors forcément le célibat non choisi, ce n’est pas le grand bonheur !

Emmanuelle se tait. Elle aimerait bien qu’il lui dise, ce jeune homme qui se pose en grand-frère, où elle doit aller pour ne pas tomber dans les travers de la jeunesse parisienne. Elle pourrait bien-sûr renoncer à rencontrer du monde : elle n’a pas la pression de devoir se mettre en couple, puisqu’elle a déjà quelqu’un. Elle n’est pas une « célibataire désespérée », et s’en félicite. Mais Thibaut est loin, et la solitude proche ; elle est blessée dans son désir d'amitié par le silence de ses anciens amis. Mais Benjamin ne la rassure pas.

- Tu sais, si tu restes… A Paris, il faut renoncer à rencontrer vite, ou alors on rencontre mal. Beaucoup de jeunes, ici, sont en mal d’amitié et angoissés face à une solitude dont ils ne voient pas la fin. Un groupe donne un confort affectif, mais ce confort est illusoire, et c’est une illusion suffisamment réaliste pour que des gens perdent des années de leur vie à passer de groupe en groupe. Mais l’amitié, pour se construire, a besoin à la fois de temps et de choix. Pour se savoir aimé, on a besoin de se sentir choisi, et un ami, c’est quelqu’un que tu as choisi. Or pour laisser de la place au choix, on est bien obligé d’accepter le vide et le silence. Et le problème de cette ville, c’est que les jeunes ne choisissent pas : ils remplissent leur agenda jusqu’à plus soif et butinent les relations.

 

« J’ai six mois à tenir seule dans cette ville », pense alors Emmanuelle. « Je peux le faire. Et après, on se fiancera avec Thibaut et je chercherais du boulot là où il vit ».

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12/04/2018

Des subtilités de parvis, de la province à Paris

Les mondanités de parvis, vous connaissez ? C'est un truc passionnant, on pourrait en faire un mémoire de socio. Voire même une thèse.

Bon, si vous êtes un peu catho, genre au moins une fois de temps en temps, vous voyez de quoi je veux parler même sans avoir fait une recherche universitaire. A la sortie de la messe, un attroupement de paroissiens papote aimablement sur le parvis, en cercles plus ou moins larges, sur une durée qui s'étend de cinq minutes à une demi-heure. Ça se prolonge éventuellement autour d'une bouffe ou d'un verre. 

Ces mondanité de parvis, qu'on retrouve presque partout, ont toutes cette même apparence ; mais sous la surface se cachent des réalités différentes... Voyez plutôt.

 

20h, un dimanche de début octobre, une église d'Etudiantville, grosse ville provinciale.

Quand Emmanuelle emménagea dans une petite chambre de bonne à Etudiantville, elle ne connaissait encore personne. A 21 ans, elle entamait sa troisième année d'étude à l'Ecole Supérieure de Trucs à Apprendre après deux ans de prépa. Il n'était donc que très naturel d'aller seule à la messe, le premier dimanche qui suivit son arrivée. En revenant de la communion, elle remarqua un gars vaguement croisé dans les couloirs de son école. La foule se pressait pour sortir de l'église, mais elle manœuvra habilement pour se retrouver à ses côtés*.

- Eh, salut, tu n'es pas à l'ESTA* ? Il me semble t'avoir croisé hier !
- Ah ouaaais je me disais bien que j'avais déjà vue quelque part ! Et ben c'est sympa ça, mais t'étais pas là à la soirée de l'aumônerie... T'es nouvelle ?
La conversation se poursuivit poliment jusqu'au parvis. Une fois descendues les quelques marches, notre étudiant - appelons-le Thibaut - retrouvait ses potes, comme tous les dimanches. Lui, ça faisait quatre ans qu'il était là : scoutisme, colocation, club de théâtre et petites chouilles entre potes... Disons qu'il avait fait son trou. 

Emmanuelle garda une distance respectueuse et s'apprêtait même à s'éloigner en voyant un cercle se former à partir de Thibaut : mais celui-ci se retourna vers elle et lui fit signe d'avancer.

- Bon, c'est Emmanuelle, elle est aussi à l'ESTA, elle débarque...
- Salut, c'est Thomas, je suis en troisième année d'ingénieur et je suis le coloc de Thibaut...
- Sophie, je suis en école d'infirmière...
- Amicie, je suis en recherche d'emploi, motivée ah ah...
- Et moi c'est Côme. Bon les gars, on se fait un kebab là ? Emmanuelle, tu n'as rien d'autre de prévu ?

 

Deux ans et des brouettes plus tard, 19h45, un dimanche de janvier, une église de l'Ouest parisien.

Emmanuelle vient de commencer son stage de fin d'étude : elle part pour six mois de vie parisienne. Son copain - appelons-le Thibaut* - est en mission à Lyon jusqu'en septembre prochain. Pour faire son trou rapidement, elle s'est mise en coloc avec deux autres cathos grâce à un réseau d'annonces : une étudiante et une salariée. A son étonnement, ses deux colocataires ne lui ont pas proposée de l'accompagner à la messe. Chacune est partie de son côté. Elle s'est donc rendue à Saint-Machin, l'église la plus proche. En revenant de communier, elle aperçoit avec joie Amicie, avec qui elle s'entendait comme larrons en foire à Etudiantville deux ans plus tôt ; elles sont d'ailleurs toujours "en contact" via Facegram (ou un truc du style). Emmanuelle manœuvre habilement pour croiser Amicie en sortant de l'église.

- Oh Emmanuelle ! Trop sympa tu débarques à Paris ? J'avais vaguement suivi sur Instabook (ou un truc du style). Je savais pâââs que t'étais dans le quartier !!
- J'ai trouvé un stage dans une super boite, là, pour six mois, plutôt cool... Et toi ça va ? Toujours le même boulot ? 
- Ecoute ça va, ouais, ça se passe plutôt bien, je suis en coloc dans le coin... Et la paroisse elle est super cool tu verras !
- Ouais trop bien j'ai vu qu'il y avait la masse de jeunes ce soir à la messe !

La conversation se poursuit le temps de sortir de l'église, de descendre du parvis, puis pour Amicie de retrouver ses potes. Emmanuelle reste quelques pas en arrière, poliment, attendant qu'on l'introduise. Amicie se retourne vers elle :

- Bon c'était trop cool de te voir ! Faudra qu'on se prenne un café un de ces quatre.

Et le cercle se referme devant Emmanuelle.

Qui rentre dîner seule, puisque ses colocs ne sont pas encore rentrées.

Prochain épisode : Emmanuelle mange une pizza avec les JP de Saint-Machin.

 

Aussi désagréable qu'est cette expérience - j'en ai fait les frais dans le temps - il faut faire l'effort de comprendre les origines du phénomène avant de jeter la pierre aux parisiens. Vous pourrez vous référer à l'article pas si débile (même s'il est écrit sur le ton de l'humour) le potentiel de potitude. Cela vous permettra peut-être de comprendre une des raisons pour lesquelles, après une intégration plus longue que souhaitée, vous ne serez pas épargnés par ce pli parisien... Rendez-vous dans deux ans !

* Si ça peut vous faire plaisir, vous pouvez imaginer qu'il était beau gosse.
* Si ça peut vous faire plaisir, vous pouvez imaginer que ça veut dire autre chose que Ecole Supérieure de Trucs à Apprendre.
* Si ça peut vous faire plaisir, vous pouvez imaginer que c'est le même Thibaut qu'au paragraphe précédent. Mais il n'est pas à Paris et ça, ça fait bien iéch.

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15/11/2017

[RAPPEL] Ces trucs pornos qu'on diffuse quand même...

- Ces images sont accessibles aux mineurs ! #Scandale

- Mais oui madame, et c'est peut-être grâce à votre partage public sur Twitter qu'un mineur pourra les voir aujourd'hui.

On voit de temps en temps fleurir sur nos réseaux sociaux des "trucs pornos" : images, textes... Récemment, c'était un film d'animation avec une saucisse baisant un hot-dog (entre autre), ou encore un court extrait d'un livre que l'éducation nationale proposerait aux adolescents (j'emploie le subjonctif car je n'ai jamais vérifié : ma réaction à ce genre de lecture  - pour être clair, c'est du porno - est d'abord de fermer mon navigateur et de réfléchir à mon rapport aux réseaux sociaux...)

De nombreux acteurs de la société entendent pourrir l'âme de nos gosses. Ce n'est pas une raison pour les laisser pourrir mon âme à moi, ou celle de mes amis. Je ne vois pas bien en quoi partager ouvertement, sans aucun message d'avertissement, des récits ou des images pornographiques aussi brefs soient-ils fera grandir la pureté dans le monde.

C'est très bien de lutter pour alerter les consciences. Encore faut-il le faire à bon escient. Vous n'avez que des contacts majeurs ? Bien. Vous sélectionnez les contacts auxquels vous laissez voir certaines publications ? Permettez moi d'en douter puisque je vous ai lus. Et je ne parle pas de Twitter... Si votre profil n'est pas fermé, vous ne contrôlez rien du tout.

Et vous ne me connaissez pas. Je pourrais être mineure. Ou avoir une sensibilité particulière : être addict au porno (c'est bien plus fréquent qu'on ne le pense) ou avoir été traumatisée par un de ces jeux sexuels auxquels les ados se soumettent, beaucoup trop, de plus en plus, et aucune classe, caste ou communauté n'est épargnée. Les blessures liées à une mauvaise expérience de la sexualité sont désormais trop fréquentes pour que le sujet soit abordé avec autant de légèreté (lisez Thérèse Hargot, c'est édifiant et tristement vrai).

Stop.

Aussi, j'ai pris la décision d'effacer de mes murs chacun de mes "amis" qui aura mis sous mes yeux un récit pornographique, quitte à passer pour une coincée. C'est pas bien compliqué nom d'un chien de mettre un lien vers le texte dénoncé en prévenant ! Mais je vois bien le désir de choquer, de scandaliser pour provoquer la réaction attendue : faire participer à une campagne de lobbying pour améliorer les choses. Échec. Si les moyens ne s'accordent pas à la fin, laissez tomber...

Amis internautes, vous n'êtes pas cohérents. Laisseriez-vous votre enfant lire ce paragraphe ? Si non, alors pourquoi vous mettez-vous en situation de le faire lire par ceux des autres ? Vous utilisez l'Anneau pour détruire Sauron. Autrement dit, vous utilisez le mal pour combattre le mal. Solution de facilité. Avec des dommages collatéraux et un résultat incertain. Alors quoi, on peut se permettre quel pourcentage de pertes ? Vous avez des chiffres peut-être ?

Si vous ne comprenez pas bien encore, vous trouverez ici un argumentaire rédigé à l'époque où tout le monde partageait des photos de cadavres... Ces images de merde qu'on diffuse quand même.

_______
PS : Oui, je suis énervée, parce que je m'adresse à des gens dont j'attendais vraiment un peu plus de jugeote, et pas à des ados de 15 ans. Vos publications Facebook ou Twitter ne sont pas des livres ou des films qu'on peut choisir de ne pas voir. Je suis libre d'ouvrir Game of Throne, de le fermer, de sauter la scène que je sentais venir depuis trois paragraphes : vous, qui avez partagé ce texte et à qui je faisais autrement plus confiance qu'à G.R.R Martin, ne m'avez laissé aucun indice quant au contenu du paragraphe que vous partagiez. Paradoxal, n'est-ce pas, qu'un écrivain agnostique respecte plus ma liberté qu'un catholique très respectueux de la Doctrine, de la Sainte Tradition et de la Morale ! Vous n'avez pas à vous excuser à mon égard, parce que vous ne m'avez pas personnellement blessée ; je ne regarde pas de porno et je n'ai pas été abusée dans les toilettes du collège. Mais j'étais au collège il y a longtemps, dans un autre siècle, un autre millénaire (après j'étais au lycée ^^). Nous partageons tous la responsabilité des plus fragiles, qui ne sont pas toujours ceux que l'on croit, et je pense de ma responsabilité de péter un câble aujourd'hui.

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17/07/2017

Epitaphe pour Doctor Who

Quelqu'un qui ne veut pas se faire spoiler très gravement sur la prochaine saison devra passer son chemin.

Les limites anciennes doivent être brisées pour que l'humain soit libre : quelqu'un qui est homme peut devenir femme sans que cela ne change rien à la dynamique de sa vie. Si Diane avait eu une identité masculine et Mercure une identité féminine, cela n'aurait rien changé à la mythologie grecque. Gandalf, s'il était là, dirait dans un sourire que celui "qui brise une chose pour découvrir ce que c'est a quitté la voie de la sagesse". Réjouissons-nous ! On a mis à bas ce mur : on va voir ce qu'il y a derrière.

Dommage, du haut de la tour, je voyais la mer...

D'autres expriment leur colère de manière plus radicale : un nerd de 17 ans m'envoie ce texte, qu'il aurait peut-être destiné au bac de français s'il en avait eu l'occasion. Le ton est assez cash et je me suis permis de remodeler certains passages (en noir). La réaction n'en est que plus intéressante, notamment par sa conclusion.

Depuis 1963, Doctor Who était le plus bel échantillon de série SF qu’on puisse imaginer. Doté d’un univers sans limite, DW était aux jours glorieux un OVNI emblématique de sa patrie britannique. Certes il y eu des difficultés, certes la série dut s’interrompre, mais c’était pour mieux recommencer il y a douze ans de cela, sous les meilleurs auspices. C’était le bon temps : Russel T Davies était aux commandes, Tennant était dans son TARDIS comme un poisson dans l’eau…

Et puis Moffat vint.

Au début, il affichait un visage bienveillant et proposait un travail tout à fait convenable… Mais peu à peu, on ressentait que Doctor Who était ‘sa’ série, son outil, son précieux : il avait tout simplement supprimé l’existence même de DW en tant que fin, pour n’en faire qu’un moyen comme un autre, un prétexte à l’expression de ses délires timey whimey divers. Désireux de mettre son nouveau jouet au service de grandes causes égalitaires (au-delà de nombreux choix scénaristiques certainement contestables mais n’étant pas le sujet du présent texte), il commença à prostituer le Docteur auprès des LGBTQXKWZGHDAJN et autres féministes bisounoursoïdes [de diverses communautés], leur donnant de plus en plus de gages de sa soumission (je ne cite pas d’exemples précis, désireux de ne pas souiller la mémoire du défunt Docteur, mais je n’en pense pas moins). Il est d’ailleurs surprenant que Moffat tombe dans ce travers dont jamais n’avait été atteint Davies, pourtant gay friendly comme nul autre [étant donné qu'il est homosexuel et connu pour son apport au cinéma gay], mais qui empli de respect pour DW, n’a jamais voulu en faire un instrument de revendication.

Dès lors qu’on considérait Doctor Who comme un moyen de dispenser à chacun un discours sociétal moralisateur, toutes les dérives étaient permises…

A noter que, en choisissant librement alors d’enrôler Doctor Who dans le cadre de débats de société clivants, la production de DW excluait certaines sensibilités politiques de son audimat par la stratégie du « convertissez-vous où partez » : je ne pense pas être le seul à avoir remarqué les nombreuses piques moralisatrices de Moffat à l’attention de ceux qui ne pensent pas comme il le voudrait (ah là là, qu’ils sont vilains !) [On pourrait accuser les féministes des choix présents ; ce serait oublier leur malaise après Kill the Moon en saison 33 8. L'instrumentalisation en elle-même finit toujours par se révéler un problème aux yeux de tous].

Moffat s’en va. Le spectre de ses idéologies reste. La nouvelle est tombée hier: le Docteur sera une Doctoresse. Cette décision en elle-même est déjà hautement contestable : il a déjà été évoqué par certains l’importance de l’aspect paternel du Docteur [c'est dans la Corbeille], ressort psychologique clé de la série (donc je ne reviens pas outre mesure là-dessus).

Deux causes peuvent justifier cette décision : au mieux, ce n’est que le choix de succomber à un effet de mode (décevant tout de même, pour une série supposée dépasser le temps lui même)… Au pire, il s’agit de l’aboutissement du détournement pernicieux de Doctor Who dans une visée militante, au service ici de l’idéologie questionnée et source de débats qu’est celle du genre (la notion d’homme et de femme ne serait que pure construction sociale, les deux seraient donc identiques et interchangeables). Si c’est consciemment dans cette visée qu’en ont décidé ainsi les grands pontes de la BBC dans la droite lignée des torts Moffatiens, ils ont oublié totalement la finalité première de la série durant les cinquante dernières années (pas si complexe à comprendre, pourtant): le divertissement pur et simple, innocent, sans arrière pensée.

Ainsi, l’image qui, dans notre inconscient, faisait du Docteur une figure paternelle à nos yeux, est brisée par un clientélisme contestable auprès de revendications diverses. Lui qui semblait éternel malgré ses régénérations, figure rassurante d’un protecteur constant, verra une partie intrinsèquement inaltérable de sa personne changée. Les plus abrutis dansent ce soir sur son cadavre (quel grand bond en avant pour cette série qui était jusqu’alors rétrograde voire intégriste !), insultant ceux (ces salauds de fascistes, réminiscences débiles d’un âge sombre et patriarcal) qui osent critiquer cette décision ancrée dans un progrès social illuminé et glorieux.

Le joujou de Moffat n’a-t’il pas été cassé par ce gamin imprudent ?

Moi-même je m’interroge : regarder la série en vaut-il encore la peine sachant qu’une part non négligeable de son identité aura été perdue ? Si Doctor Who n’est plus qu’un outil d’expression politique, pourquoi devrais-je encore m’y intéresser ? Je n’ai nul besoin de voir les revendications des uns et des autres devenir un twist majeur de mes séries préférées, enrobées d’un de ces scénarios mièvre qu’on a vu apparaître de plus en plus… Pour conclure cet épitaphe du Docteur en forme (peut-être un peu trop, mea culpa) de fusillade contre ses assassins, une petite phrase extraite du téléfilm An Adventure in Space and Time (sur les origines de la série, à voir) : « We can’t have Doctor Who without Doctor Who… »

Il y a au moins une bonne nouvelle dans tout ça : en ce jour, Game of Thrones reprend du service, et Westeros (ses joyeux massacres, ses bordels si affriolants) est un monde si peu moral qu’au moins, les producteurs de la série ne risquent pas d’avoir la prétention de nous expliquer ce qui est bien et ce qui ne l'est pas.

Vale Doctor, on a eu des bons moments !

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13/07/2017

Hosties sans gluten : le loup sort du bois

Donc, l'histoire, c'est que le Cardinal Sarah, préfet de la Congrégation pour le culte divin, a rappelé que les hosties sans gluten ne peuvent pas être utilisées pour la Messe. C'est en tout cas ce qu'Aleteia a retenu, avec la finesse qu'on lui connaît, de la Lettre circulaire aux Evêques sur le pain et le vin pour l’Eucharistie, qui vient de paraître.

Evidemment, de même qu'on peut naturellement résumer la théologie de la liturgie en un gros-titre choc livré en pâture aux fins théologiens et hommes de lettres et d'esprit qui sont seuls admis à publier sur Facebook, il y a matière à scandale.

Quid de l'intolérance au gluten ? De la maladie cœliaque ou de krohn ? Et le risque de cancer, ils y ont pensé ? Les malades et les croyants soucieux de leur santé seraient-ils privés de communion, sans pour autant qu'il n'y aie faute de leur part ? Je n'ose le dire (1) : qu'on refuse la communion aux divorcés (2), je veux bien l'entendre (3), mais qu'on empêche quelqu'un qui n'a RIEN FAIT de contraire à cette morale obsolète de communier, c'est tout bonnement dégueulasse. Vous voyez bien, qu'en fait de justice, il n'y en a pas. Vous voyez bien, que cette prétendue morale est seulement un tissu de vieux rites poussiéreux qui écrasent l'Homme au lieu de le mener vers Dieu. On vous l'avait bien dit ! Vous ne nous croyiez pas, et bien maintenant, vous l'avez, l'évidence. Elle vous crèverait les yeux si elle avait des cornes.

Il s'avère qu'une amie a un proche concerné. Même le peu de gluten que comporterait un quart d'hostie, pris seulement une fois par semaine, peut être très dangereux pour sa santé. Cette personne communie donc sous l'espèce du vin, sur le côté de l'autel, après la communion du prêtre et juste avant la communion des fidèles (au moment où ceux qui vont donner la communion communient eux-mêmes, le cas échéant : pas de coup de projecteur sur cet humble fidèle). Cela n'a jamais présenté le moindre problème d'organisation (bien-sûr, le prêtre est prévenu).

Evidemment, faute de source d'information, on ne peut pas connaître les solutions pratiques que les personnes concernées ont mis en œuvre.

Et puis d'ailleurs - et puis surtout - il est bien plus intéressant, plutôt que s'appuyer sur des cas réels pour faire le tour des solutions pratiquées à un problème ponctuel, d'en profiter pour tout simplement arrêter d'imposer une liturgie à qui que ce soit. Faisons de ces soucis de santé une opportunité pour laisser chaque assemblée de fidèles décider de ce qu'elle veut faire le dimanche. D'ailleurs, pourquoi du pain de froment, pur et azyme ? Serait-ce uniquement parce que Jésus avait cela sous la main il y a 2000 ans ? Mais enfin, il aurait été en Chine, il aurait utilisé des chips de riz ! Tout ça, c'est un moyen d'asservir le fidèle avec des queues de cerise qui se font des nœuds aux cheveux coupés en quatre.

Et au fond, il est là, le débat. Pourquoi accepter le joug de la tyrannie cléricale ? Si l'on se décidait une fois pour toute à abandonner cette conception totalitaire - n'ayons pas peur des mots (4) - qu'est la liturgie, non seulement les personnes allergiques au gluten pourraient communier, mais surtout (et c'est là qu'est le véritable progrès), l'Eglise Catholique embrasserait enfin la Réforme dans ce qu'elle a de plus pur : la liberté !

Vive Calvin, à bas la dictature du Vatican !

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PS : pour se faire une idée moins caricaturale de la Lettre, il suffit de la lire ;
PPS : ce que j'ai fait...
PPPS : mais j'aime bien troller.

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(1) Je me retiens sur Facebook, mais rassurez-vous, je me lâcherai dans un commentaire sur le site de Golias, quand on sera entre laïcs éclairés.
(2) Omettons le mot remarié, histoire d'amorcer le sentiment d'injustice que mon propos vise à établir.
(3) Je suis en train de me donner l'air conciliante pour avoir l'air plus ouverte au débat, mais je suppose que vous l'avez remarqué.
(4) Mais bon, si je n'en avais pas peur, c'est le mot fasciste que j'aurais employé.

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