17/07/2013
Veiller avec les Hobbits - Livre V (17/20)
Ambassade du mensonge
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Comprenant que leur espoir n'est pas dans les armes, les armées de Gondor et de Rohan, réunies sous le commandement d'Aragorn, tentent une diversion. En attirant les armées du Mordor dans le nord du pays, ils ont une chance de libérer le terrain à Frodon et Sam, pour que ceux-ci puissent jeter sans encombre l'anneau de pouvoir dans les flammes du volcan où il a été forgé. C'est seulement ainsi que Sauron peut être détruit. Mais il est certain que l'armée d'Aragorn va vers une défaite, et qu'aucun ne survivront. Gandalf, Aragorn et les amis de Frodon ignorent aussi que celui ci s'est fait voler ses armes et vêtements par les orques qui l'avaient fait prisonnier. Alors qu'ils ont rassemblé leur armée devant les Portes Noires du Mordor, un émissaire de Sauron vient négocier leur retrait... et leur présente les objets que Fordon a perdu.
« Manteau de nain, cape d'elfe, lame de l'Ouest déchu, et espion du petit pays de rats qu'est la Comté – non, ne sursautez pas ! Nous le savons bien – voici les marques du complot. Mais peut-être celui qui portait ces choses était-il une créature que vous ne seriez aucunement affligé de perdre, et peut-être en est-il autrement ; quelqu'un qui vous est cher, peut-être ? Dans ce cas, recourez rapidement au peu d'intelligence qui vous reste. Car Sauron n'aime pas les espions, et le sort de celui-ci depend maintenant de votre choix. »
Personne ne lui répondit; mais il vit leurs visages gris de peur et l'horreur dans leurs yeux ; et il rit derechef, car il lui semblait que son jeu marchait bien. « Bon, bon ! dit-il. Il vous était cher, a ce que je vois. Ou bien sa mission était-elle de celles que vous ne voudriez pas voir échouer ? Elle a échoué. Et maintenant, il endurera le lent tourment des années, aussi long et lent que peuvent les faire nos artifices de la Grande Tour, et il ne sera jamais relâché, sinon peut-être quand il sera changé et brisé, de sorte qu'il puisse venir vous montrer ce que vous avez fait. Cela sera assurément – à moins que vous n'acceptiez les conditions de mon Seigneur. »
« Nommez-les, dit Gandalf avec fermeté ; mais ceux qui étaient près de lui virent son expression d'angoisse, et il paraissait à présent un vieillard desséché, écrasé, vaincu en fin de compte. Ils ne doutèrent pas de son acceptation. »
« Voici les conditions, dit le Messager, qui souriait en les regardant l'un après l'autre. La racaille de Gondor et ses alliés abusés se retireront aussitôt derrière l'Anduin, après avoir fait le serment de ne jamais plus attaquer Sauron le Grand par les armes, ouvertement ou secrètement. Toutes les terres à l'est de l Anduin seront à Sauron et à lui seul pour toujours. L'Ouest de l'Anduin jusqu'aux Monts Brumeux et à la Trouée de Rohan sera tributaire du Mordor, les hommes n'y porteront aucune arme, mais ils auront la liberté de diriger leurs propres affaires. Ils contribueront toutefois à la reconstruction de l'Isengard qu'ils ont détruit sans motif ; celui-ci appartiendra à Sauron, et son lieutenant y résidera : non pas Saroumane, mais quelqu'un qui soit digne de confiance. »
Regardant le Messager dans les yeux, ils lurent sa pensée Le lieutenant serait lui-même, et il rassemblerait sous sa domination tout ce qui restait de l'Ouest; il serait le tyran des habitants et eux ses esclaves.
« Mais Gandalf dit : « C'est beaucoup demander pour la libération d'un seul serviteur : que votre Maître reçoive en échange ce pour l'acquisition de quoi il lui faudrait autrement mener maintes guerres ! Ou le champ de Condor a-t-il détruit l'espoir qu'il mettait dans la guerre, de sorte qu'il tombe dans les marchandages ? Et si, en fait, nous attribuons une telle valeur à ce prisonnier, quelle garantie avons-nous que Sauron, le Vil Maître de la Perfidie, observerait ses engagements ? Où est ce prisonnier ? Qu'on l’amène et qu'il nous soit remis, et nous examinerons ces demandes. »
Il parut alors a Gandalf, qui observait intensément le Messager, comme un homme engagé dans un duel avec un ennemi mortel, qu'il était désorienté : mais il eut vite un nouveau rire.
« Ne faites pas, dans votre insolence, assaut de paroles avec la Bouche de Sauron ! s’écria-t-il. Vous demandez une garantie ! Sauron n'en donne point. Si vous sollicitez sa clémence, vous devez d'abord vous plier à ses ordres. Je vous ai dit ses conditions. C'est à prendre ou à laisser ! »
« Nous prendrons ceci ! » dit soudain Gandalf. Il rejeta de côté son manteau, et une lueur blanche brilla comme une épée dans cet endroit noir. Devant sa main levée, le répugnant Messager recula, et Gandalf s'avançant saisit et lui prit les signes : manteau, cape et épée. « Nous prendrons ceci en mémoire de notre ami, s'écria-t-il. Quant à vos conditions, nous les rejetons entièrement. Allez-vous-en, car votre ambassade est terminée et la mort vous guette. Nous ne sommes pas venus ici pour perdre notre temps en paroles en traitant avec un Sauron déloyal et maudit ; et encore moins avec un de ses esclaves. Allez-vous-en ! »
Livre V, chapitre X, p 950-951
La tentation de compromis nous a souvent guetté, et certains s'y sont laissé prendre. Derrière se cache souvent un mensonge : faire croire à l'ennemi qu'il serait stupide de ne pas céder, que nous sommes disposés à lui donner ce qu'il souhaite pour un peu qu'il se plie à notre volonté. Apprenons à déceler le chantage affectif et le mensonge qui se cache derrière des paroles qui nous incitent à renoncer en se donnant des apparences de sagesse. Mais refuser la compromission n'ira pas sans sacrifice et sans chagrin.
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