08/01/2015
Non, non, non à l'amalgame !
J'ai attendu aujourd'hui, parce que avec le choc et l'émotion qui suivit, n'est-ce-pas, le message risquait de manquer d'efficacité hier.
Et bien il y a trois amalgames contre lesquels j'entends lutter.
1) L'amalgame que les jihadistes font entre leurs actions et l'Islam. Il faut lutter contre le mal à sa racine, et en l'occurrence, ce n'est pas le français de la rue qui s'est rendu coupable d'amalgame (on rappellera à toutes fins utiles que cet amalgame là, c'est les jihadistes eux-mêmes qui l'ont lancé).
2) L'amalgame entre les jihadistes musulmans, et les intégristes de toutes les autres religions. Ou alors on arrête d'appeler "intégristes" les courants qui n'ont jamais produit leur lot de terroristes (on rappellera à toutes fins utiles qu'un sitting, même si l'on y prie en latin, n'est pas un acte terroriste).
3) Et SURTOUT, l'amalgame entre moi et Charlie.
Je ne suis pas Charlie. Je ne dirais pas qu'on n'est pas dans la même galère. Mais sachons raison garder: Charlie Hebdo ne pouvait pas me blairer et si je m'associe à ce deuil, je ne m'associerais pas pour autant, sur le coup d'une émotion subie autant que subite, à la ligne éditoriale de Charlie Hebdo.
- Je suis choquée, effrayée, attristée et scandalisée par ce qui s'est passé à Charlie Hebdo. Je n'ai pas besoin de m'amalgamer à ce journal qui n'a jamais pu me blairer (en tant que catho pratiquante, ultramontaine et un peu tradi) pour être choquée, effrayée, attristée etc. Ce serait même insultant pour les morts. "Salut, je suis une de celles que vous méprisez et insultez depuis des dizaines d'années, et maintenant, vous et moi, c'est tout pareil, on est la même personne! Et la personne que vous caricaturiez hier, aujourd'hui, c'est vous. Vous êtes contents, hein?" Suffit de voir tout ce qu'ils ont balancé sur le compte des cathos pour comprendre qu'à la réflexion en fait c'est plutôt marrant.
- J'ai trouvé que certains dessins orduriers et diffamateurs pouvaient légitimement blesser. Hier, trois de ces personnes blessées ont tué par vengeance dans une surenchère effroyablement hallucinante. Mais je ne veux pas faire l'amalgame entre ces trois terroristes, leurs complices, les quelques petits FDP connards rigolos qui ont trouvé ça marrant, ceux qui en feraient bien autant, et le reste de toutes les personnes légitimement blessées mais parfaitement pacifiques (à qui je m'amalgame volontiers). Je continue donc à considérer que l'insulte et la vulgarité ne sont pas des arguments et que la liberté d'expression n'excuse pas tout. Si ça vous fait hurler, je parie que vous en pensez tout autant pour Zemmour ou Houellebecq.
- Ce ne serait même pas rendre hommage à la mémoire de ceux qui sont morts. S'il y a une qualité morale que je veux bien reconnaître à ces dessinateurs, c'est qu'ils ne manquaient pas d'audace. Certains parlent même à leur égard de liberté de pensée. Et bien pour leur rendre hommage, je vais conserver ma liberté de penser. Ce qui implique que je ne renie pas les désaccords quand même assez profonds qui existaient entre nous.
Et donc, je reste moi, et c'est en tant que moi même que je regrette ces morts. Mais je ne suis pas Charlie. Pas d'amalgame. Merci.
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